De Baden-Powell au scoutisme catholique

Certes, les fondateurs des SdF optent pour l’application intégrale de la pédagogie de BP, mais ils prétendent appliquer l’enseignement des encycliques pontificales sur l’éducation. “Si notre oeuvre empreinte sa technique et ses méthodes au scoutisme universel, elle ne demande qu’à l’Eglise sa vie morale et religieuse .” [1]Chanoine Cornette, in Le SdF n°1, 15 janv.1923, p.2. Pourtant, la loi scoute parle bien de morale…y aurait-il contradiction ? “S. E. (le cardinal Bourne) est le premier membre de la hiérarchie […] qui ait montré que le scoutisme authentique peut parfaitement s’adapter au catholicisme le plus orthodoxe.” [2]in BdL n°55, févr.1935. L’archevêque de Westminster affilie en effet ses troupes catholiques à l’association anglaise, et applique exactement le même scoutisme que les anglicans, avec les pratiques catholiques en plus. Il ne trouve donc rien à redire à la loi de BP. Si le père Sevin la défend aussi comme bonne en soi, il la modifie cependant quelque peu, pour la surnaturaliser. Il introduit ainsi la religion dans l’éducation morale, enseigne toutes deux aux scouts comme inséparables, en lutte contre le laïcisme ambiant de son époque. Car le catholicisme n’accorde aucune valeur à des meurs saines et exigeantes si elles ne sont pas motivées par des sentiments surnaturels. Le père Sevin introduit donc l’élément spirituel dans la morale scoute.
Si elle applique littéralement la méthode pédagogique, la Fédération française refond cependant la loi et la promesse, et ajoute trois principes , pour élaborer un scoutisme catholique en lui-même, non pas un mouvement avec la religion à côté, en plus. Un aumônier peut alors en dire : “Je me représente les SdF comme un rameau détaché du grand arbre scout et greffé […] sur Jésus, notre Cep divin.”[3]Un aumônier scout, Pour mener au Christ mes garçons , La Hutte, Paris, 1938, p.53. D’ailleurs, Bertrand Estienne explique bien que “le scoutisme catholique ne peut être totalement fidèle à BP […] . Il semble […] illusoire de justifier la valeur de son scoutisme catholique par le seul critère de conformité aux intentions de BP ; dans le débat sur l’identité des scouts catholiques , la question fondamentale est donc : comment le scoutisme catholique, tout en restant scoutisme, va-t-il marquer son originalité par rapport à BP?” [4]Bertrand Estienne, cité dans Le Scoutisme , textes réunis par G. Cholvy et M.-T. Chéroutre, Le Cerf, Paris, 1994. Nous nous attacherons donc plus spécialement, non pas à juger les SdF en fonction de leur fidélité à BP, mais à considérer où mènent leurs modifications et dans quel but ils les ont jugées utiles.

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References

References
1 Chanoine Cornette, in Le SdF n°1, 15 janv.1923, p.2
2 in BdL n°55, févr.1935
3 Un aumônier scout, Pour mener au Christ mes garçons , La Hutte, Paris, 1938, p.53
4 Bertrand Estienne, cité dans Le Scoutisme , textes réunis par G. Cholvy et M.-T. Chéroutre, Le Cerf, Paris, 1994