Compagnons Routiers

Donc le Christ va confier à des hommes la conquête du monde ! C’est prodigieux à la fois dans son but est si petit dans les moyens employés. Ou plutôt renversons les termes : d’un départ si petit, un terme si magnifique ! Pense qu’il y a là pour nous, Routiers, un fait exaltant.
Quand Il a voulu conquérir le monde, comprends-tu qu’il a d’abord voulu faire un clan, un clan routier ? C’est bouleversant. Relis ton Évangile à ce point de vue. Et notes-en les traits.
Non il n’a pas voulu les Ecoles de Rabbins, ni les Congrégations piétistes, ni des troupes armées. Ni la violence militaire, ni la puissance de l’or, ni celle du génie. Des hommes, de jeunes hommes sans moyens que leur bonne volonté, paysans, ouvriers, pêcheurs, employés du tout petit peuple de la campagne.
Et une poignée seulement. Un clan, un tout petit clan, je te dis douze compagnons et encore ! Et de très pauvres types épais, peureux, fanfarons à la fois et lâcheurs. Au point que parfois il leur avouait qu’il en avait plus qu’assez de les voir aussi fermés, aussi désespérants, aussi décevants.
Voilà les gars de la Conquête ! Jaloux, curieux les uns des autres, rêvant toujours de triomphes tout faits ; dégonflés dès qu’il leur parle de souffrir, de lutter, et d’abord, pour lui-même, de mourir.
Bref un vrai clan, nature, de tout-venant. Oui, mais tu dis bien, un vrai clan.
D’abord de Routiers. De vrais Routiers de Route. Ces hommes qui devaient un jour user les routes du monde, il les entraîne à la marche, à ramer, à nager, à camper, à cuisiner. Retrouve tout cela dans Évangile Jamais en place. Jamais assis sur des bancs d’école, et encore moins dans des fauteuils. On repart sans cesse, impitoyablement. Et lui, le chef, la nuit, il prie pour eux.
Ils sont une poignée, 12 doigts ! Mais ça c’est un beau clan solidement construit en trois équipes. Les grands cracks : avec C. E. Pierre qui sera le chef de tout le clan quand le Maître sera parti. La deuxième avec Philippe ; la troisième avec Jacques… Et tout au bout le malheureux Judas.
Une maîtrise ferme qui sera gouvernée par un homme que Jésus consacrera pour être le soutien de tous les compagnons. Simon, que Jésus baptise “Rocher” . Le chef doit être un Rocher inébranlable par sa foi et par son amour qui le lient au Christ. Les autres, il y a les deux “Fils du Tonnerre” , Jean et Jacques. Ils “respirent” le feu. Les autres, ce sont des Compagnons moyens, capables (simplement !) de se faire tuer un jour.
Voilà ! ça suffit, avec le Saint Esprit, pour bâtir son Église Un vrai clan routier. Savais-tu que c’était une si grande chose que ton clan, à la condition qu’il marche comme le “clan des Apôtres” avec ton aumônier pour remplacer Jésus-Christ.

Éditorial du Père Doncœur, La Route, 1 avril 1943

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